Que révèle l’emprunt obligataire de 800 millions de DH contracté par la Samir
Par Faiçal FAQUIHI | Edition N°:4994 – Le 03/04/2017
Avant d’être avocat d’affaires, Me Abdallah Benzekri a exercé de 2002 à 2008 comme responsable juridique chez l’ex-régulateur boursier, le CDVM. Période où ce docteur en droit a siégé à la commission de réforme de la loi sur les sociétés anonymes. Il a été également DG-adjoint de Upline Securities et a enseigné à la faculté de droit de Souissi à Rabat.
– L’Economiste: Quelle particularité juridique a une dette privée?
– Me Abdallah Benzekri: Un emprunt obligataire, qu’il soit privé ou avec appel public à l’épargne, a toutes les caractéristiques d’une créance sur l’émetteur. Ce dernier engage son patrimoine pour en assurer le remboursement. Cette dette obligataire est régie par la loi sur les sociétés anonymes au niveau de son émission et de ses modes d’extinction.
Dans le cas de la Samir, l’émission est de même nature juridique que la majorité des émissions pratiquées sur le marché financier. Ce type d’opération peut être assorti de garanties (sûreté réelle notamment). Dans ce cas, les droits de leurs détenteurs sont renforcés par rapport aux créanciers ordinaires en cas de défaillance de l’entreprise émettrice. Les obligataires qui respectent les délais de déclaration de créance (2 mois dans ce cas) n’ont a priori rien à craindre.
– Comment analysez-vous le décalage entre la loi et la pratique…
La masse des obligataires a un mandataire. Il est élu par son assemblée générale ordinaire. Elle a un an pour le faire à compter de l’ouverture de la souscription, et au plus tard 30 jours avant le premier amortissement prévu. Mais en attendant la tenue de l’assemblée, le conseil d’administration désigne, dès l’ouverture de la souscription, un mandataire provisoire… Dans la pratique, cette solution provisoire dure… Le mandataire provisoire représente souvent les obligataires jusqu’à la maturité de l’émission et son remboursement! Personne ne sait après si les créanciers se sont constitués en masse des obligataires (voir ci-dessus). Si celle-ci tenait des réunions régulières, si cette masse a joué son rôle auprès des instances sociales de l’émetteur (accès aux assemblées générales des actionnaires, aux documents qui leurs sont remis…).
– Sur le contrôle accordé à la masse des obligataires, quel enseignement tirer?
– La défaillance de certains émetteurs comme Samir a montré les limites de la pratique en matière de représentativité des obligataires. Un émetteur peut faire défaut. La masse des obligataires doit jouer pleinement son rôle de gardienne des droits des souscripteurs, comme le prévoit la loi.
Le fait que certains créanciers aient mandaté d’autres cabinets d’avocat nous renvoie au problème épineux de la représentativité des obligataires.
Propos recueillis par Faiçal FAQUIHI